Magmatisme et métamorphisme mésozoïques dans le haut atlas central (région d’Imilchil). Pétrologie et implications géodynamiques.

Abstract

Le basalte triasique de la région d’Imilchil du haut Atlas central affleure au cœur des rides de Tassent, Tasraft, Tirrhist, anefgou et Ait Ali Ouikkou en ‘’fragments’’ discontinus. Il couvre en discordance, les roches subvolcaniques jurassiques on s’intercale entre ces dernières et l’encaissant carbonaté. L’encaissant ne montre aucune trace de métamorphisme de contact ou de cuisson. Les critères volcanologiques sont ceux d’une coulée mise en place dans un milieu intertidal à supratidal. Les affleurements représentent des faciès proximaux formés sur une pente faible au voisinage de la zone d’alimentation à partir d’une lave à basse viscosité et à température élevée. La cristallisation fractionnée est déclenchée à 1100°C à basse pression. Le fractionnement est dominé par les plagioclases, les pyroxènes et les olivines. La fugacité d’oxygène (fO₂), élevée dans les derniers stades de la différenciation est tamponnée par la cristallisation de l’amphibole et la biotite. Le chimisme des pyroxènes et la composition chimique de la roche totale sont ceux des séries tholéiitiques continentales sodiques des associations anorogéniques intraplaques. Le magma est hautement contaminé selon le modèle ACF (assimilation + cristallisation fractionnée). Les plutons jurassiques affleurent au cœur des rides précitées. Ils sont composites à troctolites, gabbros, diorites, et syénites différenciées par cristallisation fractionnée. La température de cristallisation est comprise entre 800°C et 1200°C. la pression est estimée entre0.5 et 1.5 Kbars. L’affinité magmatique est transitionnelle (entre l’alcalin et le tholéiitique). Le magma parent est de type basalte picritique, hydraté et à forte fugacité d’oxygène. Le fractionnement précoce et important des olivines, la participation des magnétites dans la phase cumulus et le fractionnement intense des amphiboles ont amplifié la sursaturation du liquide résiduel (jusqu’à asiO₂=1) et provoqué l’apparition des syénites quartziques. Le magma à l’origine des plutons aurait été injecté, au cours de la phase de dislocation de la plate forme du Lias, dans la partie profonde des structures en fleur négative des accidents transtensifs E-W et dans les failles normales NS. Il est piégé dans les niveaux carbonatés et forme de petits corps intrusifs. Le blocage des deux compartiments, de part et d’autres des accidents N70 à EW, provoque le redressement à la verticale de l’encaissant et la formation des anticlinaux éjectifs entrainant vers la surface les corps magmatiques déjà refroidis en profondeur. Les argiles du Trias joueraient le rôle de lubrifiant, favorisant le glissement. A cette étape, les coulées de basaltes triasiques auraient été, morcelées, désolidarisées de leur encaissant originel, puis extrudées accompagnant les plutons dans différentes positions structurales. Les corps magmatiques ont laissé derrières eux les auréoles de métamorphisme. La source du magmatisme mésozoïque du haut Atlas central serait localisée à une profondeur proche de 60Km dans la zone de transition : 1herzolites à spinelle et à grenat. Le taux de fusion partielle serait de l’ordre de 6 à 8%. Au Trias, le magma devrait traverser de grandes épaisseurs de la croute continentale à travers des canaux restreints et dispersés facilitant l’érosion thermique. La composition initiale d’affinité transitionnelle serait modifiée au passage par l’assimilation des granitoïdes et des roches pélitiques du socle. La tholéicité des basaltes triasiques est une tholéicité secondaire induite par la contamination crustale. Au Lias, le régime tectonique change du distensif au transtensif, et donne naissance à un magmatisme fissural aligné NE-SW abondant et localisé émis par l’intermédiaire de failles ou de canaux élargis. L’érosion thermique n’est pas favorisée et le magma n’est relativement primitive, transitionnelle. Le régime tectonique transtensif maintient sans variation, l’épaisseur réduite de la croute continentale et le magma garde la même affinité le long du jurassique. Le magmatisme mésozoïque du secteur d’Imilchil, voir de l’ensemble du Haut atlas central, serait l’expression vers le Sud du Groupe bético-levantino transitionnel de la chaine ibérique. Ce groupe est situé géographiquement entre la superprovince magmatique alcaline de l’Est et la superprovince magmatique tholéiitique de l’Ouest. Il forme une province transitionnelle en relation avec l’étape du rifting qui précède l’ouverture de la Téthys occidentale. Cette conclusion magmatique est concordante avec l’évolution sédimentaire, stratigraphique et paléogéographique. Dans la totalité de l’extension du Haut Atlas central, les formations triasiques (roches magmatiques et sédiments) présentent une paragenèse métamorphique de faible degré. Les équilibres des phases indiquent des transformations dans des conditions de faciès actinote-pumpellyte (2-4 kbars et 300°C), montrant localement des critères de schiste vert de basse pression. Elles expriment l’effet d’un flux thermique finitriasique-liasique contemporain au rifting atlantique.