Les brûlures caustiques du tractus digestif supérieur ( A propos de 266 cas )

Abstract

L’ingestion de produits caustiques constitue une urgence diagnostique et thérapeutique. Les lésions caustiques du tractus digestif sont graves par la mise en jeu du pronostic vital dans l’immédiat en cas d’ingestion massive et du pronostic fonctionnel par le biais des sténoses digestives qu’elles engendrent. Nous rapportons une étude consécutive de 266 cas de lésions caustiques colligés dans le service des urgences chirurgicales viscérales durant une période de 7 ans. L’âge moyen de nos patients est de 30 ans, avec un sex ratio de 1,2 en faveur du sexe masculin (soit 54,5 %). 77 % des cas d’ingestion de caustiques étaient dans un but d’autolyse. L’esprit de sel (HCl) est le produit le plus utilisé (80,8 % des cas). Dans 34,2 % des cas, la quantité ingérée est ≥ 150 ml. 21 % des patients ont présenté un tableau clinique alarmant à l’admission. L’endoscopie digestive a été réalisée chez 208 patients (soit 78,2 %) dans un délai ≤ 24h chez 45 % d’entre eux. 17,8 % des lésions étaient de stade I, 39,4 % étaient de stade II, 36,5 % étaient de stade III, et enfin 1 % étaient de stade IV. 12 patients ont été opérés en urgence, alors que les autres, surtout les patients de stade III, ont bénéficié d’une surveillance clinique rapprochée. 13 d’entre eux ont été opérés secondairement suite à une aggravation de leur tableau clinique. Sur l’ensemble de nos patients, 29 sont décédés (soit 10,9 %), dont 24 à court terme et 5 à long terme. 72,2 % des patients ont bien évolué à court terme alors que 18,8 % sont perdus de vue. Par ailleurs, 14 % des patients ont développé des sténoses digestives. Sur les 76 cas de stade III, 5 ont été opérés en urgence dont 1 est décédé, et 6 autres ont été opérés secondairement suite à une aggravation de leur état clinique et dont 3 d’entre eux sont décédés. La prise en charge des lésions caustiques relève d’une approche multidisciplinaire. La fibroscopie digestive reste un examen capital dans la mise en place d’une stratégie thérapeutique adaptée. Ainsi, l’attitude thérapeutique adoptée vis à vis des formes bénignes (satdes I et IIa) et des formes graves (stade IV) fait l’unanimité des différents auteurs. Par contre, les avis divergent en ce qui concerne les formes sévères (stades IIb et III). Pour certains, la décision chirurgicale en urgence est indiscutable, alors que pour d’autres, une intervention chirurgicale face à de telles lésions n’est pas systématiquement requise. Dans notre expérience cumulée, les résultats n’avantagent pas l’attitude attentiste avec 27,3 % de décès contre 10 % de décès observés durant la période interventionniste précédente. Malgré les études et les progrès réalisés dans la prise en charge des brûlures caustiques du tractus digestif supérieur, la morbidité et la mortalité restent lourdes parmi la population jeune, et le problème de l’attitude thérapeutique la mieux adaptée aux formes sévères reste toujours posé.