Evaluation de l'état de santé des côtes marocaines par l'utilisation des techniques biologiques chez les moules Perna perna et Mytilus galloprovincialis

Abstract

Dans l’objectif de contribuer à l’évaluation de l’état de santé de l’environnement de l’ensemble des côtes marocaines, le présent travail propose d’utiliser les techniques biologiques et les combinant aux analyses chimiques chez les deux mollusques Perna perna et Mytilus galloprovincialis, retenus dans le cadre de ce travail comme espèces sentinelles. Dans un premier temps, la mise au point et la validation de deux nouveaux biomarqueurs ont été effectuées comparativement chez ces deux espèces de moules. Il s’agit de la mesure de l’activité catalase (CAT) et le dosage des teneurs des métallothionéines (MTs). Cette mise au point a tenu compte des différents facteurs pouvant influencer ces deux paramètres. Ainsi, les conditions optimales de dosage de l’activité CAT ont été déterminées et sont fixées comme suit : pH=7 ; T°=25 ; [H₂O₂]=15 mM et [enzyme]=1 mg/ml. L’optimisation du dosage des MTs a permis de retenir la méthode d’extraction par Fractionnement Ethanol/Chloroforme et la détermination spectrophotométrique des teneurs de ces molécules en utilisant le réactif d’Elman. Ensuite, deux catégories d’expériences in vitro ont été réalisées. Elles ont consisté en un suivi de la réponse de cinq biomarqueurs (AChE, CAT, GST, MTs et MDA) après exposition des moules i) à trois classes de polluants chimiques purs (métaux lourds, HAPs et pesticides) afin d’évaluer la toxicité de ces derniers, et ii) au sédiment des sites de la baie d’Agadir. Les résultats montrent que la réponse des biomarqueurs in vivo de la moule Perna perna au sédiment prélevé dans plusieurs sites de la baie, différents par leur degré de pollution, ont permis d’identifier des sites sources potentielles de pollution dans la baie et de mettre en évidence la dispersion de celle-ci au large de ces côtes. Par ailleurs, l’application du test de stress on stress (SOS) chez les moules prélevées, in situ, dans différents sites de la baie ou exposées à l’eau de ces sites ou bien a certains polluants purs, révèle que la réponse au test est significative selon le degré de pollution des sites ainsi que la toxicité des polluants testés. Ces résultats ont été également confirmés par ceux obtenus par les biomarqueurs. De plus, l’application de ce test est intéressante comme outil pour l’évaluation de l’état de santé des écosystèmes, en raison de la simplicité de sa mise en œuvre. La seconde partie a porté sur l’étude de la pollution métallique dans l’ensemble des côtes marocaines, ainsi l’analyse chimique des métaux lourds (Cd, Cu, Pbn Hg et Zn) a été effectuée chez P. perna tout en évaluant la réponse biologique à cette pollution à travers le dosage des biomarqueurs. Les résultats de ces analyses ont mis en évidence des zones fortement contaminées par le Cd (30 µg/g) PS) et par le Cu, ces zones sont localisées au voisinage des sites recevant les rejets des industries de traitement de phosphates (Jorf Lasfar et Safi). Une contamination relativement élevée en Pb et Hg est détectée dans les zones à forte activité humaine (ports, centres urbains) ainsi que dans certains estuaires. Nous signalons également l’aspect marqué de la dispersion de cette contamination à partir des sources précitées et qui se manifeste selon un gradient de pollution nord-sud le long des côtes atlantiques marocaines. Pour les sites loin des activités polluantes, la contamination serait liée à l’effet de l’upwelling qui entraîne l’enrichissement des eaux superficielles en certains contaminants (cadmium) au même terme que les sels nutritifs. Les résultats de l’analyse chimique des métaux concordent parfaitement avec ceux obtenus via la réponse des biomarqueurs. Ces derniers ont montré des réponses significatives selon le degré de pollution observé dans les sites prospectés. En effet, une nette inhibition de l’AChE et l’induction des activités CAT et GST ainsi que les taux de MTs et de péroxydation lipidique (teneurs en MDA) ont été observées chez les moules originaires des sites les plus polluées. L’ensemble de ces résultats, plaide en faveur de l’utilisation de ces techniques dans les programmes de biosurveillance en milieu naturel.