Variations de paramètres nutritionnels, cliniques et biologiques au cours du mois de Ramadan chez des sujets supposés sains et des diabétiques de type 2

Abstract

Le jeûne du mois de Ramadan constitue l’un des cinq fondements de l’Islam. Il s’agit d’un jeûne intermittent qui se prolonge tous les jours de l’aube au coucher du soleil durant un mois par an. Il diffère du jeûne physiologique, par sa durée plus longue qu’un jeûne nocturne et sa situation dans le cycle nycthéméral. Il correspond à la période où la dépense et les besoins énergétiques sont les plus forts et où l’organisme est « ravitaillé ». Il diffère d’un jeûne prolongé par sa durée plus courte et sa périodicité. Ce jeûne sacré demeure largement suivi par les musulmans et a des répercussions sociales et économiques importantes et donc un nouveau rythme de vie touchant essentiellement les habitudes alimentaires, le sommeil les horaires de travail. Ces changements ont sans doute des conséquences biologiques et physiologiques sur l’organisme humain. Le sujet diabétique est plus sensible que le sujet non diabétique aux variations extrêmes d’apports nutritionnels (jeûne ou apport alimentaire excessif) et les réponses hormonales sont inadaptées dans ces situations. Si la prise en charge de la maladie diabétique impose l'équilibre de l'insuline ou des anti-diabétiques oraux et un changement des habitudes alimentaires (afin de respecter l’équilibre nutritionnel) d’une manière générale tout le long de l’année, ce problème est encore plus accentué en période de Ramadan où l’alimentation nocturne abondante est riche en sucres et en lipides. Ce travail a été effectué entre 1419 et 1423 de l’Hégire période durant laquelle le Ramadan se situait entre le mois de décembre et novembre. Il est formé de trois séries d’études complémentaires (la 1ère et la 2ème se sont intéressées aux sujets supposés sains et aux sujets diabétiques, la 3ème série est une étude interventionnelle médicamenteuse sur un lot de patients diabétiques) avec un effectif total de 159 sujets , un IMC moyen < à 27 kg/m2 et on s’est intéressé à l’effet du jeûne du Ramadan sur les modifications cliniques, diététiques et métaboliques. Dans notre travail,durant le mois de Ramadan (où la durée du jeûne ne dépassait pas 13 heures) et indépendamment de l’état physiopathologique, l’amplitude de variation des paramètres cliniques (poids, tension artérielle systolique et diastolique) et biologique à savoir le bilan glucidique (glycémie à jeun, glycémie post prandiale capillaire, l’insulinémie, Le peptide C, fructosamine et HbA1C) lipidique (triglycérides, cholestérol total, HDL chol, LDL chol, leptine), hépatique (transaminases (PAL, ASAT , ALAT) , bilirubine totale) rénal et protéique (urée,créatinine, acide urique, protéines totale), électrolytique (sodium, potassium, chlorure osmolarité plasmatique) et hématologiques ( Hématies, VGM, TCMH, CCMH, Leucocytes, polynucléaires neutrophiles, lymphocytes, monocytes, Plaquettes),quoique statistiquement significative dans certains cas, sont restées dans les limites normales. Les apports caloriques journaliers ont démonté des fluctuations (bien que statistiquement significative) dans les limites des besoins énergétiques indépendamment de la maladie diabétique et aussi l’importance de l’éducation diététique du diabétique jeûneur comme en témoigne la 3ème série ( apport normocalorique avec respect des composantes alimentaires (lipides, glucides,protides)) Au terme de ce travail un certain nombre de points méritent d’être signalés : -la difficulté pratique dans la réalisation des essais clinico-biologiques pendant le Ramadan apparaît au premier lieu une difficulté méthodologique ces difficultés sont d’ordres géophysiques, pharmacologiques et stratégiques. Le jeûne du Ramadan qui se caractérise par une alternance de jeûne diurne et une suralimentation nocturne, n’est pas sans conséquences chez les sujets sains et à fortiori chez les patients diabétiques. - Les conditions de vie associées à la pratique du jeûne pendant le mois de Ramadan seraient à l’origine de modifications des mécanismes métaboliques et physiologiques. Ces modifications se traduisent par des fluctuations de faibles amplitudes de quelques paramètres biologiques. On parlera d’un déplacement des valeurs de référence à l’intérieur de l’intervalle usuel. Les modifications ne s’effectuent pas uniformément pour tous les paramètres et ne surviennent pas régulièrement à une période donnée du Ramadan. La plupart sont relevées la première quinzaine ou à la deuxième quinzaine du jeûne. Les tendances vers l’augmentation ou la diminution, observés chez les patients "sains", peuvent se traduire chez les gens à la limite de la normale par de fausses valeurs pathologiques et chez les malades par de fausses aggravations des valeurs. L’organisme sain développe alors des réactions de compensation afin de contrecarrer les variations encourues, et préserver ainsi la stabilité des constituants sériques. -L’analyse de nos séries montre l’importance de l’éducation nutritionnelle pendant le Ramadan. L’idéal serait une cohorte de volontaires sains et de patients multi ethniques, multicentriques, insérées dans un programme multicentrique sur un long terme. Cohorte qui pourrait donner aux générations futures des réponses tangibles sur des questions de plus en plus pointues vu l’évolution des techniques médicales et des concepts thérapeutiques de la médecine.