Anatomie séquentielle et géochimie des phosphates de Bouabout ( Gisement de Meskala, Maroc ) : Eléments pour un modèle génétique

Abstract

Le secteur de Bouabout, situé dans le gisement phosphaté de Meskala, sur la bordure nord du Haut Atlas, se caractérise par une diversité de faciès dans le temps et dans l’espace sans logique apparente. L’étude statistique méthodique des faciès a permis de proposer un modèle de dépôt où on reconnaît deux séquences-types : des séquences proximales et des séquences distales. L’ensemble de la série phosphatée, s’échelonnant du Maastrichtien au Lutétien, se compose de trois mégaséquences à évolution régressive. Dans chacune des mégaséquences, la mésoséquence phosphatée, généralement strato et granodécroissante, occupe une position intermédiaire entre une mésoséquence à dominance marno-siliceuse, strato et granocroissante et une mésoséquence carbonatée sans évolution significative. Les corrélations séquentielles, ainsi que l’évolution granulométrique, montrent un amincissement de la série phosphaté vers le Nord et vers l’Est, accompagné d’une augmentation de la taille du grain moyen. On en déduit que l’Est et le Nord correspondant à des milieux moins profonds, relativement agités, alors que l’Ouest et le Sud correspondent à des milieux assez profonds et à faibles énergie. A l’échelle de l’ensemble du bassin de Meskala, l’évolution paléogéographique est contrôlée par deux éléments importants : le diapir de l’Oued Tidsi à l’Ouest contrôlant le renouvellement des eaux et le seul de Guemessa à l’Est influençant la répartition géographique des phosphates. Les études micrographiques et minéralogiques mettent en évidence deux groupes de minéraux : d’abord des minéraux détritiques puis des minéraux autigénétiques. Les premiers sont représentés par des quartzs, des illites et des kaolinites ; les deuxièmes par des phosphates, des dolomies, des calcites, du quarte néoformé, des sepiolites, des attapulgites et au moins une partie des smectites. L’évolution verticale minéralogique traduit le passage d’un pôle peu confiné à un pôle assez confiné. L’analyse stadiale permet de dégager la chronologie des différents phénomènes diagénétiques : ils débutent par une dolomitisation, se poursuivent par une silicification et se terminent par une dédolomisation et une calcitisation. La dolomitisation et la silicification sont liées à la présence de la matière organique, la dédolomisation à l’émersion. L’étude de la matière organique montre d’une part l’abondance d’une palynoflore riche en Dinoflagellés, en relation avec des courants d’upwelling palynoflore riche en Dinoflagellés, en relation avec des courants d’upwelling et un climat aride et d’autre part, une bonne qualité de cette matière organique avec un pourcentage en COT assez élevé et en fort potentiel pétroligène. Cette étude a montré aussi la faible maturité de la matière organique ce qui implique que la série phosphatée a été peu enfouie. Les propriétés géochimiques de la matière organique ont permis de conclure que les phosphates se sont formés dans des zones d’oxydation ménagée, c'est-à-dire dans des zones intermédiaires entre un pôle réducteur et u pôle très oxydant. En conclusion, la série phosphatée s’est déposée dans un bassin à seuil, alimenté par des courants d’upwelling, sous un climat aride durant des phases de montées des eaux. La position relative de l’interface eau-sédiment par rapport à l’interface O₂/O₂ minimum et O₂ minimum/H₂S contrôlant la phosphatogenèse explique le caractère rythmique de la série étudiée.