Pollution des eaux souterraines par le nitrate en zones irriguées : Facteurs explicatifs et expérimentation, cas du Tadla

Abstract

Dans les périmètres d’intensification agricole, la pollution diffuse des eaux souterraines accentue le déséquilibre que connait le secteur de l’eau au Maroc et génère un risque sanitaire pour la population rurale s’approvisionnant directement de l’aquifère. Sa maîtrise nécessite a priori, l’identification des causes et la compréhension des mécanismes responsables de cette pollution. La présente étude réalisée dans le périmètre irrigué du Tadla, où ce problème commence à devenir alarment, a pour objectif de cerner cette pollution à travers une démarche complète et approfondie comportant : - A l’échelle régionale : • de la pollution nitrique des eaux souterraines ; • L’identification et l’analyse des facteurs explicatifs de cette pollution ; - Et à l’échelle de la parcelle : • L’étude expérimentale de la dynamique de l’eau et de l’azote minéral dans le sol au cours du cycle culturel du blé. Les teneurs en nitrate des eaux souterraines observées pendant la période de suivi (Août 96 – Avril 98), ont varié entre 3 et 228 mg NO₃⁻/I. Sur 100 puits prospectés, 14 à 50% de puits ont présenté des teneurs en nitrate qui dépassent 50 mg NO₃⁻/I, le maximum étant enregistré au mois d’Octobre. La surfertilisation azotée et l’irrigation non maîtrisé sont les causes directes de la pollution nitrique des eaux souterraines dans cette région. De même, à part la texture du sol, la teneur en argile et les paramètres qui leur sont corrélés, les autres facteurs étudiés notamment, le niveau faible des nappes par rapport au sol, la vitesse d’infiltration du sol en milieu saturé, généralement élevée, les teneurs assez importantes du sol en matière organique et en azote total et le pouvoir de minéralisation élevée des sols, couplé aux conditions écologiques favorables, joueraient positivement en augmentant la vulnérabilité de la nappe à cette pollution. La superposition des cartes thématiques par le SIG et l’analyse en composantes principales n’ont permis de mettre en évidence aucun lien direct entre la teneur en nitrate des eaux souterraines et les paramètres étudiés probablement en raison de l’homogénéité du milieu physique et de l’accumulation de la pollution suivant le sens d’écoulement des nappes. Deux indications du risque de pollution nitrique des eaux souterraines ont été également investigués à l’échelle régionale : l’azote potentiellement lixiviable et l’azote minéral résiduel ainsi que son évolution pendant l’été. Les résultats de ces études témoignent de la nécessité d’une meilleure gestion du cycle d’azote dans le sol. Par ailleurs, l’expérimentation menée à l’échelle de la parcelle a montré que des quantités appréciables d’azote minéral, provenant soit de la fertilisation azotée soit de la fourniture naturelle du sol, se trouvent dans le sol au cours du cycle culturel du blé (entre 200 et 680 kg N/ha dans la couche 0-100 cm du sol). Elles constituent un risque potentiel de pollution de la nappe par le nitrate d’autant plus élevé que la lame d’eau est importante. La rationalisation de la fertilisation azotée et la maîtrise de l’irrigation constituent donc des éléments clés dans le contrôle de la pollution des eaux souterraines par la nitrate dans cette région. D’autres pratiques agricoles telles que l’enfouissement des résultats de récolte à C/N élevé, le semis précoce, dense et sans apport d’azote et la pratique des dérobées d’été peuvent également réduire le risque de lixiviation du nitrate au-delà de la zone racinaire.